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Vilaine fille
9 décembre 2006

la peur de la honte

depardon_turin

Il y a quelques jours, j’ai vu à la télé la rediffusion d’un reportage
sur des gens qui tentent de survivre avec leur RMI.
Je n’ai pas découvert une planète inconnue, hélas.
Non, ce qui m’a marquée, encore une fois, c’est la honte
et l’absence de colère.

Je lis le lendemain dans Libé que selon une étude de l’ONU,
 « 2 % de l'humanité détiennent 50 % des richesses sur le globe,
quand 50 % n'en détiennent que 1 %. »

Alors je me demande, encore une fois : pourquoi on accepte ça ?
Sont-ce les «  opiums »  dont on nous abreuve ? 
Non, je ne crois pas que ça suffirait.
La vraie raison, elle prend aux tripes.
C’est la peur.
La peur panique de perdre le peu que tu as.
Ce salaire misérable, ce boulot minable, ce petit chef puant,
ce n’est pas pire que le cauchemar qui t’est diffusé tous les soirs
à 20 heures pour ne pas que tu risques d’oublier ce qui t’attend
si jamais tu pètes les plombs et commences à revendiquer
une augmentation ou des meilleures conditions de travail
(ou seulement, de te faire payer les heures que tu fais..) : 
La rue, la misère, la HONTE !!!

Car le pire est peut-être là : les pauvres ont honte d’être pauvres.
Honte de ne même pas être digne de passer à la télé,
vous vous rendez compte ! Houhouhou !!! Va te cacher, sale pauvre !
T’as même pas une belle voiture !
Pas de colère dans leurs yeux ! Pas de révolte ! Ils disent que c’est
eux qui ont foiré, que c’est de leur faute s’ils ne trouvent pas de
travail !

J’ai compris un truc. La précarité est entretenue.
Elle sert de garde-fou.
Elle sert à calmer les autres, tous les autres, tous ceux qui ont
encore assez de fric pour avoir une maison où regarder une télé qui
leur explique bien tout ça.
Les Restos du cœur, le Secours Populaire, les cabanes en planches
au bord du périph, voilà ce qui va vous arriver si vous avez le
malheur de vous rebeller !
Ton SMIC, tu crois pas qu’ils en voudraient tous ces gens, hein ? 
Et toi, femme, de quoi tu te plains, avec ton mi-temps en contrat à
durée déterminée, toi qui donnes le meilleur de toi-même, toi qui
restes  assise à ta caisse de supermarché ou à l’hôpital à torcher les
vieux  jusqu’à dix heures ou minuit sans te plaindre, dans l’espoir
de signer un jour le « sésame » qui changera ta vie, le CDI…… qui
te permettra enfin de faire des crédits pour t’endetter  jusqu’à la
fin de tes jours……. .ce qui t’empêchera de faire grève tout autant 
que la peur du chômage !

Les très riches peuvent dormir en paix.  
La machine est bien réglée.

D’ailleurs, pour eux, les prévisions sont très optimistes :
« D'ici à 2016, le nombre de millionnaires pourrait plus
que doubler dans les pays du G7. Un bond de + 158 %,
soit 16,3 millions de millionnaires,
contre 6,3 actuellement.
»

Elle est pas belle la vie ?

*

(photo Depardon)


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Commentaires
C
La dignité oui c'est bien de cela qu'il s'agit comme un besoin d'humanité et d'être malgré tout responsable de son destin, voilà ce qu'il reste quand il n'y a plus grand chose. Pas de pitié, de charité, ce ne sont que de pis aller uniquement destinés à donner bonne conscience en se posant en position de supériorité (la main qui donne est plus haute que la main qui reçoit) . Les jugements métaphysiques moraux sur les marginaux servent à soulager la mauvaise conscience, à se dédouaner, à se déresponsabiliser, à se conforter dans son cocon, pour continuer à péter dans la soie.
J
La précarité, c’est un pas de plus vers la misère qui peut concerner chacun de nous. La solidarité est la solution dont malheureusement on s’éloigne de plus en plus, malgré les beaux résultats du téléthon. <br /> La charité c’est bien, mais ce qu’il faut, c’est un changement politique et économique plutôt qu’une rupture tranquille.
B
Bon, ton analyse est assez pertinente, il est clair que la précarité et le chômage permettent aux lobbies financiers d'exercer une pression à la baisse sur les salaires et les conditions de travail. Mais à contrario, depuis que l'être humain s'est constitué en société, on en connaît pas une seule qui n'est eu ses exclus, ses drogués, ses délinquants, ses putes. En tout temps et en tout lieu. Un peu comme si c'était une tare inhérente à la condition humaine, en société.Evidemment, ça veut pas dire qu'il ne faut rien faire, mais attention aux idéaux ...<br /> Attention aussi : quand on est dans la misère, on peut être tenté de s'en sortir par tous les moyens, y compris au depends de celui qui tend la main... Prudence. <br /> Bon je coche "se souvenir de..." je sais pas à quoi ça sert.
P
D'accord avec ton analyse, la peur, la honte... font que nous sommes devenus incapables de nous tourner vers ceux qui en ont besoin...il en faut du courage pour passer de belles paroles aux actes...<br /> <br /> J'ai lu ce billet hier soir, et puis un autre, et ainsi de suite, il prend d'ailleurs encore plus de force au milieu des autres... belle découverte... je reviendrai.
D
Je ne parlais pas de nous, mais la résignation des pauvres gens qui savent qu'ils ne se sortiront jamais de leur surendêtement, chomage et misère...
Vilaine fille
Vilaine fille

"...Fille folle, amante du vent... Boucle ton corset... Baisse bien la tête... Méfie-toi : Qui aime le vent engendre la tempête..."
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